Les OGM

GloFish, un poisson génétiquement modifié pour être fluorescent [7]

Les OGM sont-ils compatibles avec une société libre ? Peuvent-ils être utilisés dans le respect de la liberté et la propriété de chacun ?

Mais d’abord, que ce sont les OGM ? Pourquoi les utilise-t-on ? Quels sont les arguments des partisans d’une interdiction et en quoi ne sont-ils pas valables ?

Avant les OGM

Depuis des millénaires, l’homme a compris qu’il pouvait améliorer les espèces animales et végétales. En observant par exemple qu’un chiot hérite des caractéristiques de ses parents, l’homme a compris qu’il pouvait choisir quels animaux il voulait faire se reproduire en fonction des caractéristiques recherchés chez les enfants. C’est grâce à ce processus que nous avons obtenu les chiens de races, et de manière générale tous les animaux de la ferme sont le résultat d’une longue sélection (vaches, chevaux, poules, etc.).

Le choux sauvage [1]

Ce qui est moins connu, c’est que l’ampleur du phénomène est tout aussi importante chez les plantes. Par exemple, le choux, le brocoli, le choux-fleur et le choux de Bruxelles sont à l’origine une seule et même plante, le choux sauvage (ci-contre), et c’est la sélection opérée par l’homme qui a permis d’obtenir toutes ces variétés cultivées. Les différences sont tout aussi importantes pour la plupart des plantes cultivées, que vous ne reconnaîtriez pas si vous voyiez la forme originale.

L’avènement de la génétique

l’ADN (représentation schématique) [2]

Bien qu’il ait pratiqué l’amélioration des espèces par la sélection depuis longtemps, cela fait moins d’un siècle que l’homme a compris pourquoi cette amélioration marchait. On a en effet découvert que les caractéristiques des plantes et animaux sont déterminées par les gènes. Lors de la reproduction, certains gènes viennent de la mère et d’autres du père, expliquant la ressemblance des parents et de leurs enfants.

Un OGM (organisme génétiquement modifié) est un animal ou une plante dans lequel on a rajouté (ou enlevé) un gène de manière dirigée. C’est-à-dire qu’au lieu de laisser faire le hasard de la reproduction et de choisir les descendants qui nous plaisent, on met directement le gène qui nous intéresse. Cette méthode a aussi une propriété exclusive qui est de permettre d’insérer un gène venant d’une autre espèce. Par exemple le gène rajouté dans le maïs Bt vient d’une bactérie.

Les OGM sont régulièrement utilisés dans la recherche. Par exemple on utilise des souris génétiquement modifiées pour développer certaines maladies, afin ensuite de tester des traitements. Une modification génétique très courante consiste aussi, chez les plantes par exemple, à « effacer » un gène et voir ce qui arrive à la plante.

Les OGM agricoles

Intéressons-nous maintenant au sujet dont tout le monde parle : les OGM en agriculture. La modification génétique est une technique, l’effet dépend du gène précis que l’on rajoute ou qu’on enlève. Les plantes génétiquement modifiées peuvent par exemple être :

Riz classique et riz doré (génétiquement modifié) [5]

  • Tolérante à un herbicide : la plante génétiquement modifiée est résistante à un herbicide qui par ailleurs tue toutes les autres plantes. L’agriculteur peut alors désherber facilement son champ avec cet herbicide qui tuera toutes les mauvaises herbes mais pas la plante qu’il cultive. C’est ce type de modification génétique qui est le plus utilisé dans le monde aujourd’hui [3]. Exemple : le soja Roundup Ready® de Monsanto.
  • Résistante à un insecte : la plante produit un insecticide qui tue un insecte qui lui serait nuisible. Cette méthode est une alternative à l’épandage direct de l’insecticide. C’est l’autre grand type d’OGM utilisé aujourd’hui en agriculture. Exemple : le maïs Bt.
  • Composition chimique différente : la pomme de terre Amflora de BASF est modifiée pour être plus facile à utiliser en industrie car elle contient un amidon plus adapté.
  • Couleur : des œillets génétiquement modifiés pour être violets.
  • Vitamines : le riz doré est enrichi en vitamine A (et a aussi une couleur dorée).

Les OGM dans une société libre

L’utilisation des OGM est possible dans le cadre du respect des droits de propriété et de la liberté de chacun, et leur utilisation est laissée au choix du consommateur qui choisit d’acheter les produits avec ou sans OGM. À l’inverse, leurs opposants ne se contentent pas de les boycotter et de faire de la propagande, mais souhaitent bien souvent imposer leurs convictions en en interdisant l’utilisation à tous. De nombreux mauvais arguments sont avancés, que nous allons discuter ici. Notons que je ne discuterai absolument pas de l’intérêt ou non des OGM, cela étant le choix de chacun d’acheter ce qui lui semble utile, mais simplement du bien-fondé d’utiliser la réglementation pour empêcher l’utilisation de cette technologie.

L’argument du danger pour la santé

Si j’achète un produit quelconque en supermarché, et que quelques jours plus tard je suis malade à cause de l’inclusion d’un ingrédient poison, je suis en droit d’attaquer en justice le producteurs pour empoisonnement. Implicitement, lorsqu’on achète quelque chose vendu comme comestible, le contrat garantit qu’il ne s’agit pas d’un poison. Le contraire est une violation de la vie du consommateur.

À l’inverse, si je ne mange que des frites pour seul repas pendant des semaines et que je tombe malade suite à cela, je ne peux pas accuser le producteur de m’avoir empoisonné, car le danger vient de mon utilisation « inattendue ». De même, si je fume toute ma vie, je ne peux pas accuser le fabriquant de cigarettes de m’avoir empoisonné, car les effets du tabac étant connus, j’ai fais mon choix en sachant ce qui m’attendait.

Pour considérer qu’il y a violation de la vie de l’individu, il faut que le producteur ait soit sciemment vendu un produit toxique sans l’indiquer comme tel, soit que le producteur ignore la toxicité mais qu’elle est très facilement testable et on peut alors considérer qu’il a empoisonné son client par négligence. Par contre, il est impossible de demander à un producteur une garantie de non-toxicité à long terme. Les effets à long terme de n’importe quel produit ne peuvent pas être connus d’avance.

Dans le cas des OGM :

  • Des tests sur des rats sont pratiqués à court terme pour vérifier qu’il n’y a pas d’effet flagrant (auquel cas le producteur serait en train de délibérément empoisonner son client).
  • Il est impossible, comme pour tout autre produit, de garantir une absence d’effet à long terme. Le choix du risque à prendre ou non doit alors être laissé au consommateur, qui peut considérer que les bénéfices dépassent ou non les risques.

La contamination des champs

Un argument avancé pour l’interdiction des OGM est que les plantes OGM contaminent les champs voisins. Cette contamination a bien lieu, de la même manière qu’avec n’importe quelle plante, génétiquement modifiée ou non. Le problème avec cet argument est que si on doit considérer comme une violation de propriété la présence de « quelques » plants de la culture du champ voisin, alors tout agriculteur, qu’il produise des OGM ou non, viole la propriété de son voisin et « contamine » son champ. Ce phénomène n’est en rien spécifique aux OGM. Typiquement on considère alors qu’une contamination faible est tolérée (de l’ordre de 1% [6]). Demander une étanchéité parfaite de tous les champs serait impossible, et la demander seulement pour les OGM serait un biais purement arbitraire.

Le non-intérêt des agriculteurs

C’est probablement l’argument le plus stupide, qui consiste à dire « il faut interdire aux agriculteurs d’utiliser les OGM car cela va contre leurs intérêts ». Les agriculteurs, dans la chaîne de production, sont directement ceux qui font le choix. C’est donc bien eux qui déterminent si ce choix est leur intérêt ou non.

Le non-intérêt des consommateurs

Un argument fréquemment utilisé est « les consommateurs ne veulent pas en manger majoritairement », mais en quoi le souhait d’une partie des consommateurs, même majoritaire, doit s’imposer à ceux qui souhaitent en manger ? De plus, les consommateurs ont parfaitement le droit de choisir les produits, et en ont bien la possibilité en pratique, les producteurs insistant bien sur le « garanti sans OGM » dès lors que le consommateur pourrait avoir un doute. Certains commerçants vont même jusqu’à garantir pour la viande qu’elle provient d’animaux qui n’ont eux-même pas mangé de plantes OGM. Pourtant, la viande d’un animal mangeant des OGM ne contient aucune trace de l’OGM, mais le consommateur peut par ce choix d’achat refuser les OGM, y compris pour l’alimentation animale. Le marché libre permet alors au consommateur d’exprimer son choix. Ces initiatives d’étiquetages n’ayant rien d’imposé par l’État, elles montrent clairement que l’action libre des producteurs permet de répondre aux attentes du consommateur.

L’étiquetage obligatoire : qui paye l’information ?

On serait tenter de justifier un étiquetage obligatoire pour garantir la liberté de choix du consommateur. Mais ce n’est pas si simple. En effet qui décide de quelle information est pertinente pour le consommateur ? Le militant anti-OGM qui refuse la technologie par principe sera satisfait de l’information « OGM / pas OGM », mais un consommateur plus informé pourrait décider qu’il accepte les OGM type maïs Bt (par exemple pour limiter l’usage des insecticides) mais pas les OGM de type tolérance aux herbicides. Un autre pourrait n’accepter que les OGM ayant un intérêt pour sa santé, etc. Mais si on suit cette logique, on peut très bien être intéressé par la manière dont on été abattus les animaux, s’ils ont été élevés en plein air ou non, si les poules avaient des cages assez grandes. Pour les plantes on pourrait vouloir connaitre la quantité d’herbicides, la quantité de CO2 produite, etc.

Le nombre d’informations que au moins quelqu’un pourrait souhaiter est immense. Imposer par la loi l’ajout d’une information est une violation de la liberté de tous les consommateurs qui se fichent de l’information. En effet toute information a un coût, car le producteur doit être sûr de la validité de l’information.

La bonne solution, compatible avec la liberté de chacun, est de laisser faire le marché pour décider quelle information est pertinente ou non pour le consommateur. Ainsi, on observe par exemple que, sans obligation d’affichage, les informations suivantes sont volontairement fournies au consommateur sur certains produits (exemples parmi tant d’autres) :

  • absence d’OGM
  • viande d’animaux nourris sans OGM
  • élevage en plein air ou en basse-cour pour les poules
  • sans huile de palme
  • agriculture biologique

La liberté d’étiquetage des producteurs, couplée à la liberté de choix des consommateurs, permet donc à chacun de faire ses choix en fonction de ses préférences.

Sources et notes

[1] Image sous licence CC-BY-SA provenant de http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Brassica_oleracea0.jpg et mise en ligne par « MPF »
[2] Double-hélice d’ADN. Source : PDB (identifiant 1JDJ)
[3] Rapport 2012 de l’ISAAA (voir diapos)
[4] Round-up Ready System
[5] Image sous licence CC-BY-SA. Auteur : International Rice Research Institute (IRRI). Source : http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Golden_Rice.jpg
[6] Dans l’Union Européenne : Plus précisément si on a un champ OGM et un champ non OGM, le producteur du champ non OGM pourra vendre sa production comme non OGM malgré une contamination par les OGM du voisin à condition qu’elle ne dépasse pas 0,9%.
[7] Source : http://www.glofish.com/

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